« Pis Steph, c’est quand tu lances ton nouveau produit? »
Cette question là, on me la demande régulièrement. Question amusante tout de même. J’aime toujours raconter des histoires autour de ça. Après tout, je suis le fondateur low profile, introverti pas très bavard. Sous-entendu, kossé tu fais Steph?
La réponse de haut niveau est simple: Je réfléchis aux choses qu’on a pas le temps de réfléchir quand on est dans le day-to-day.
Tsé, quand on a trop la face collée sur l’arbre, on ne voit pas la forêt.
Concrètement, ça veut dire lire beaucoup, penser au long terme, discuter avec les gens du milieu, poser des questions, écouter, identifier des problèmes, imaginer des solutions… et essayer de voir clair là où d’autres voient de la brume.
La plupart des idées sont à chier et ne vont pas bien bien loin. Quelques unes sont bonnes et ont peut-être un potentiel. Une est excitante et représente, à mon avis, le futur, mais revient à foutre le feu dans la cabane. J’y reviens.
J’ai même exploré l’avenue de faire des acquisitions. Mais c’est non concluant pour le moment. Et honnêtement, c’est juste pas moi. Je ne suis pas un hard core business dude qui va grandir par acquisitions. Moi, je règle des problèmes avec des solutions originales.
Mais j’ai un problème pour régler des problèmes.
Explication:
DashThis a réussi parce que son exécution a été excellente, mais surtout parce que j’étais archi-focus. Pas parce que l’idée est bonne (ni mauvaise).
Des idées, ça ne vaut rien versus les efforts qu’on met à les réaliser. Comme mon pote Edison disait: Genius is 1 inspiration and 99 perspiration.
DashThis a réussi par qu’il y avait une poignée de gens assez débiles pour faire tout ce qu’il fallait faire afin que la shop survive aux premières années critiques. Celles où 90% des compagnies meurent.
Meurent faute de gens dédiés qui croient en la mission. Faute de focus. Faute d’exécution quasi-parfaite. Faute d’avoir trouvé le product / market fit. Faute de premiers clients royalement satisfaits. Faute d’avoir pensé plus à eux qu’à nous. Faute d’avoir avancé et itéré rapidement. Faute d’avoir fait l’effort supplémentaire nécessaire. Faute d’avoir persévéré quand tout semblait foutu.
C’est ça que ça prend pour réussir un produit. Et c’est ça le problème.
C’est un bon dilemme. Par exemple, où met-on les ressources de développement et marketing? Sur le produit actuel qui paye les salaires de tout le monde et rapporte du profit ou bien sur la nouvelle patente à Steph qui va prendre 3 ans avant qu’on sache si c’était un bon move? Est-on réellement convaincu de la pertinence d’investir? Pourquoi investit-on au juste? Question focus, on se concentre où? Qui? Combien de temps? Et qui veut travailler sur les vieux trucs alors qu’on peut travailler sur le nouveau kossin cool?
Je pourrais en écrire long sur le sujet. D’ailleurs, la plupart des shops SaaS à succès se concentrent sur un seul produit. Même Basecamp qui avait plusieurs produits se sont débarrassés des distractions pour ne se concentrer que sur un seul.
Par dessus tout, si on veut mon avis de visionnaire gourou un brin fou, il y une opportunité de revoir complètement le monde du dashboard et des rapports. Moi, quand tout le monde fait les choses de la même façon ça me dit qu’il est temps de faire différent. Et ça, ça veut dire tout scraper ce qui fonctionne pour construire un truc nouveau qui a peu de chance de réussir.
Pas créer un produit pour cette année, mais faire le produit qui sera, peut-être, la norme dans 5-10 ans.
Réinventer la façon dont les marketeux font des rapports. Rendre DashThis et les autres obsolète. Job peu payée. Zero budget. Chemin vers le succès inexistant. Probabilité de survie sur 3 ans quasi nulle. Certitude de faire rire de toi. Mais opportunité de construire le futur et de ne pas être embêté par le mot “impossible”.
Excitant non? Qui embarque?
Je blague. Ça n’arrivera pas.
J’aime cette citation de je-ne-sais-pu-qui qui disait “Le rôle des gestionnaires est de structurer les visionnaires et le rôle des visionnaires est de détruire la structure des gestionnaires”.
Alors donc, quel produit va nous amener Steph?
Présentement, je navigue dans les eaux tranquilles. Je cuisine des trucs d’intelligence artificielle avec Google Analytics et Search Console. Rien de concret ni de précis. C’est un processus de découverte tout ça, rien de magique.
C’est long? Peut-être, mais c’est quoi l’urgence? La compagnie va bien, tout est prévisible et bien défini. C’est pas comme si le feu était pogné et qu’il fallait se revirer de bord en 6 mois. Aucun doute que ça peut rouler de même pendant plusieurs années encore. J’aime dire qu’on est dans notre phase iXmedia, cette belle compagnie Web de Québec qui est “pareille” depuis 20 ans.
Faut dire aussi qu’on est pas animé d’une vision grandiose comme SpaceX qui veut aller sur Mars ou Amazon qui veut être le “everything store” planétaire. Ma vision initiale, faire une belle shop lifestyle, a été réalisée voilà quelques années déjà. La vision actuelle n’est plus celle d’un rêveur, mais plutôt d’un administrateur. Le pommier est mature, on récolte les pommes.
C’est bien correct comme ça. Je n’aime pas les choses compliquées et sans raison. Lancer un produit seulement pour lancer un produit, c’est une très mauvaise idée. Le marché évolue, les clients, les employés, plus de coûts, plus d’attentes, plus de pression, les SaaS deviennent des commodités… pas besoin de compliquer les choses davantage en ajoutant une couche supplémentaire. Faudra que ça en vaille réellement la peine et que ça fonctionne dans les contraintes actuelles pour que j’aille de l’avant avec un nouveau produit.
Et si c’était autre chose qu’un produit? Je réfléchis aussi à l’idée d’être un évangéliste… On n’a pas de figure qui fait la promotion d’un leadership d’opinion auprès de notre clientèle. Il y a plein de CEO influents qui sont bons là dedans: Jason Fried, Steli Efti, Nick Francis, Alex Turnbull, Noah Kagan, etc. Bon, je ne suis pas CEO, mais “founder” ça doit être “good enough” pour la job.
L’aspect communauté est aussi à développer. Je ne parle pas d’un compte Facebook ou Twitter, mais faire de quoi pour aider le monde, rendre service, être utile sans rien demander en retour.
Sans compter que la compagnie elle-même est à développer. La compagnie en soi est un produit qu’on vend aux employés, clients, partenaires, etc.
Faut aussi garder en tête qu’on est une business lifestyle. Mine de rien, ça prend de la discpline et du focus pour le rester. C’est facile de tomber dans la piège de la croissance, grossir pour grossir. Le but est de travailler moins et faire plus de profits, pas de travailler plus et faire moins de profits…
Bref, pour le moment, je garde mon chapeau de Christophe Colomb et je continue d’explorer à la recherche de la nouvelle route des Indes. Peut-être que je vais ramener du blé d’inde et du chocolat? Ou bien je vais plutôt finir en ragoût dans une marmite préparée par des cannibales? Le fun est dans l’aventure!