Savais-tu que Ahrefs faisait 40M$ en ARR avec 40 employés en 2019? Selon ce que je lis, ils seraient maintenant proches du 100M$ avec “seulement” 57 employés.
Pas mal. Pas mal du tout. Je blague, c’est phénoménal!
C’est plus de 1M$ de revenus par employé. C’est définitivement une ligue à part. Dans le club select des Google, Facebook, Basecamp, Supermetrics, ClickFunnels, Unbounce et compagnie.
Est-ce beaucoup? Oui considérant que la moyenne d’une bonne compagnie SaaS privée serait plutôt autour de 150K$. Ça serait autour de 300K$ pour une compagnie publique.
Le revenu par employé démontre une efficacité à capter de la valeur avec le moins de ressources possible. En plus que généralement les salaires comptent pour la majorité des coûts d’une shop SaaS. Plus le chiffre est grand, plus l’entreprise sera performante. Plus elle sera libre de réaliser sa mission en toute liberté, comme elle l’entend.
De mon point de vue, j’ai déjà amené ma compagnie à proche 200K par employé, mais ce n’était pas un niveau facile à maintenir quand on a grossi l’équipe. En d’autres mots, pour grandir l’équipe de 10 personnes il aurait fallu ajouter 2M$ en ARR dans la même période. 20 personnes c’est 4M$. Plus facile à dire qu’à faire!
Pire, à 1M$ par employé, ça veut dire qu’à chaque nouvelle personne qu’on rentre dans la shop, y’a 1M$ de revenus supplémentaire. Par contre, c’est quand même tabou ces chiffres. C’est plus amusant de parler du headcount qui est la métrique vaniteuse par excellence. Je dis qu’on est 10 et on me regarde de haut. Je dis qu’on est 38 et on fait “Wow, ça marche tes affaires!”. Pourtant, ça veut tellement rien dire. Il y a des shops de 100 qui font moins de fric que d’autres qui ne sont que 10.
Mais bon, le point ici est que ces compagnies qui atteignent le 1M$ de revenus par employé sont hors norme! Et pour y arriver, ils doivent penser hors norme.
Ça reste que c’est fascinant. Ça me titille, j’ai ce feeling que j’ai ce qu’il faut pour faire parti de club select.
Le plus curieux dans le cas de Ahrefs, c’est qu’ils n’ont même pas d’équipe de ventes. Que des développeurs, du monde au marketing et des gens au support.
La raison? Le fondateur / CEO est un type “product first” ce qui veut dire que tout part du produit. Le produit est le marketing. Le produit est “les ventes”. Le focus est sur le produit, sur répondre le mieux possible au besoin du marché. Le CEO est impliqué dans son produit jusqu’aux oreilles. “Nailer” le produit dans un marché en croissance veut dire une croissance organique débile.
Clairement, il comprend la game SaaS / marketing digital.
Encore mieux, au marketing, ils ne font que très peu de paid. C’est majoritairement du contenu éducatif. Ça leur donne donc un coût d’acquisition très bas. C’est une stratégie qui prend du temps par contre. Ce n’est pas pour les impatients.
Quand je regarde ça, je me dis que j’ai encore beaucoup à apprendre. Entretemps, je paye la taxe Google: À défaut d’avoir réussi le fit produit / marketing ultime qui se vend tout seul, je paie Google pour générer des ventes!
Toi je ne sais pas, mais moi ça me parle. 1M$ de revenus par employé c’est le genre de défi qui me motive. C’est bold et cinglé en même temps.
C’est le genre de truc débile qui fera qu’on va me dire “Pfff, ça marchera jamais”.
On m’a dit ça pour DashThis. On m’a dit ça pour presque tous mes projets depuis 25 ans.
Mais bon, que veux-tu, je suis têtu. J’ai tendance à faire à ma tête et à essayer quand même. Comme le dit Mark Twain, “ils ne savaient pas que c’était impossible alors ils l’ont fait”.
Alors c’est quoi le plan?
Premièrement, il faut faire plus avec ce qu’on a. Dans mon cas, ça veut dire automatiser ce qui s’automatise et enlever le plus de friction possible. Cette fichue friction se retrouve dans tous les aspects de notre produit. On a pas fini de polir et polir, puis polir et encore polir.
Deuxièmement, il faut grossir la tarte et notre fourchette. On a une limite intrinsèque à notre domaine. Disons que ceux qui font des rapports SEO sont une toute petite portion du marché SEO que Ahrefs adresse. Dans ce cas, soit on y va à fond dans la spécialité afin d’être le meilleur dans un créneau de niche, soit on élargit. Pour ma part, ça vient de ma personnalité, je préfère élargir, créer des synergies avec d’autres outils complémentaires. Ces temps-ci je suis fasciné par l’intelligence artificielle et les possibilités que ça amène. Suffit d’un peu d’imagination pis BOOM! 💥
Troisièmement, il faut peaufiner la culture d’initiative. Il faut essayer des tactiques, mesurer, apprendre, ajuster, répéter. Pour atteindre ce niveau ça prend la badge Master Yoda en marketing. L’aspect marketing c’est un énorme chantier. On ne parle pas d’être une belle p’tite shop, mais d’être un joueur qui se compare à Ahref. Ça prend l’attitude et les couilles en conséquence. Il faut constamment combattre la gravité qui nous fait devenir une commodité.
Quatrièmement, en fait ça devrait venir en premier, mais ça prend une vision du futur. Tu veux faire comme les autres ou cultiver ta propre tribu? Grosse différence. Je fais rire de moi quand j’en parle, mais secrètement, je pense que le futur est de rendre le monde des dashboards obsolète. De la même manière que Netflix est passé d’un locateur de DVD en ligne, d’un fournisseur de streaming à producteur de contenu. Le but est toujours la même chose, aider les clients à démontrer leur performance, mais le moyen, lui, doit évoluer.
Cinquièmement, ça prend plus de développement client. Je ne parle pas de ventes, je parle de “parler” aux clients. C’est à dire développer des relations, écouter leur quotidien, comprendre leur réalité, leurs frustrations, leurs problèmes. C’était la raison de mon succès les premières années. J’étais quotidiennement en contact avec les clients. Tu ne construiras pas une business above average en restant caché. Il faut sortir dehors, rencontrer les clients.
Finalement, mon casse-tête depuis le tout début: Du reporting, ce n’est pas l’fun. Ce n’est pas sexy. Ce n’est pas épanouissant. C’est un mal nécessaire comme la soie dentaire. J’ai déjà fait des rapports et je détestais tellement ça que j’en ai fait un produit pour soulager le bobo. Mais, je ne connais personne qui « trippe » à faire ça. Si on compare à Ahrefs, c’est tout l’inverse, on se trouve bon quand on utlise leur outil. Comment virer cette perception de bord? Si on peut rendre la vente de matelas en ligne sexy, on peut sûrement le faire avec les rapports…
Et si je ne réussis pas à atteindre ce fameux seuil de 1M$ de revenus par employé? Bah, disons que je me “plante” que je ne fasse que “seulement” 500K par employé, ou même 300K, ça serait vraiment un échec? Je me reprendrai dans un projet futur. Crime, j’ai seulement 43 ans, il me reste de très bonnes années!
Mais bon, c’est bien beau tout ça, mais il n’y a pas de “playbook”. C’est autant une science qu’un art. Il faut être fin finaud en marketing, en psychologie, en communication, en techno… Il faut être curieux, il faut être en mode apprentissage continuel, il faut être humble, il faut laisser ses idées préconçues au garde-robe, il faut parler, mais surtout écouter énormément les clients. Il faut aussi écouter notre équipe qui sont une mine d’or d’idées. Il faut être capable d’imaginer où sera le monde dans 5-10 ans, il faut tester, il faut oser, il faut être capable de faire des erreurs et vivre avec. Mais surtout, surtout, surtout, il faut être 100% dédié à l’exécution. Le secret est là, dans l’action. Parler moins, agir plus.
» Lecture complémentaire pour devenir un badass du marketing: 19 SaaS Marketing Strategies That Bootstrapped Ahrefs To $40m ARR